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Un balcon sur la mer

par Pierre Fresnault-Deruelle

Un balcon sur la mer
  • Titre de l'oeuvre: Terrasse à Sainte Adresse
  • Artiste: Claude Monet
  • Date: 1867
  • Type: huile sur toile
  • Dimension: 98 x 130 cm
  • Localisation: Metropolitan museum - New-York
  • Crédit de l'image: ©Domaine public

BIOGRAPHIE

Pierre Fresnault-Deruelle est ex-Professeur à Paris 1 (sémiologie de l’image). Il est  désormais membre coopté  du groupe INTRU (Interactions, transferts, ruptures  artistiques et culturels) de l’Université François –Rabelais de Tours.  Il a  fondé le MUCRI en 1999, écrit une vingtaine de livres, dont L’éloquence des images, PUF, 1993,  Intelligence des affiches,  Editions Pyramyd, 2011, Hergéologie, Presses universitaires François-Rabelais,  2013. Il prépare une livre sur Edgar-Pierre jacobs et un autre sur l’iconographie politique.

PAR LE MêME AUTEUR

Un ukiyo-é occidental

Cet inaudible cri qui nous assaille

Préséances

Le cubo-futurisme jazzy de Demuth

L’esprit des salons

L'embrasure fait le spectacle

La cécité d’Holopherne

Lamento

Contrepoint

Photographie peinte

Une vaste salle d’attente

Une impassabilité de façade

Le grand absent

Cette jambe qui dépasse

Un éloge en forme d’ "icone"

Le gandin mélancolique

La couleur du temps

La diagonale

L’instant qui conte

Pas la vue, la vision : l’entrevision même

La laideur n’est pas inéluctable

Le mur ou la peinture séparée d’avec elle-même

L'immobile intranquillité de Jésus

Bacchanales

La conjoncture, forme supérieure de la conjonction

L'oeil du diadème

Du physique au méta-physique

La Loire

La barque bien menée

La réinvention de Gradiva

Le bout du monde

L’ange, comme en retrait

Le spectacle est aussi dans la salle

D’impassibles machines

Le surréalisme souriant de René Rimbert

La pesanteur et la grâce

Chambre avec vue sur rien

Surprise

Abscisses et ordonnées

Le bout du monde

Le testament d'Orphée

Ligéria ou le lit du fleuve

Soleil noir

Algorithme

Basse tension

Un tableau vivant

2500 ans avant le cinéma

La lune décrochée

La pesanteur et la grâce

Une bien profane icône

Une carte postale avant la lettre

Austère et jubilatoire

Le noeud rose

Entre-deux

Le mille-têtes

Le livre qui tombe

L'étendue du désastre

Un balcon sur la mer

par Pierre Fresnault-Deruelle


Bien avant que Julien Gracq n’écrive son Balcon en Forêt, Claude Monet, En 1866, peint Terrasse près du Havre dit, aussi, Terrasse à Sainte-Adresse. Comme l’écrivain du XX°, le peintre du XIX°s. affectionne l’idée de montrer un promontoire aménagé depuis lequel il est loisible d’observer la nature environnante. L’idée n’est pas neuve qui, dès avant le Romantisme, pousse Moreau l’Aîné, par exemple, à faire de la clôture d’un jardin la rampe depuis laquelle un personnage admire un coin de campagne. Avec Monet et quelques autres, le bord de mer , littéralement « inventé » avec la vogue hygiéniste des toutes nouvelles stations balnéaires, fait son entrée dans la peinture comme objet pittoresque.

Monet brosse ici une quasi-scène de genre dont l’apparente simplicité est bien vite déconstruite par le spectateur. Entre deux mats, où flottent deux drapeaux (dont les couleurs -hormis le vert – condensent les teintes de la toile), un jeune couple semble échanger quelques mots. Sans doute, l’homme et la femme occupaient-ils les fauteuils laissés vacants dans le jardin. Ils se seraient donc levés pour quitter le demi-cercle des sièges où sont encore assis une ombrelle et un canotier, puis seraient venus se découper sur le rectangle bleu-vert délimité par les hampes. Les deux personnages, debout, posent comme poseraient deux figures dans l’atelier de quelque photographe, un atelier où, sur la toile de fond, en trompe-l’œil, des voiles et des navires à vapeur animeraient la mer un jour de grand soleil.

Dominant l’ensemble, un spectateur imaginaire – moi – observe la « salle » ( le jardin) et la « scène » ( le jeune couple devisant). Cette distribution des lieux qu’on retrouve chez nombre d’ impressionnistes (Degas, Renoir, Lautrec, Zandomeneghi, Mary Cassatt, etc.) est une sorte de poncif, né sans doute du fait que la vie sociale est, depuis longtemps, considérée comme un théâtre. Quoi qu’il en soit le canotier ( de trois-quarts) et l’ombrelle ( de dos) font office d’ordonnateurs : ils organisent pour nous une histoire. De fait, c’est dans la ligne de visée des personnages assis que les personnages debout se sont distribués comme pour signifier quelque idylle.

A bien y regarder, nous comprenons que ce tableau est un tout à la fois homogène et composite. D’une part, les trois plans de l’image se présentent comme uncontinuum naturel ; d’autre part, ces mêmes trois plans forment une composition dont l’artifice même paraît être le sujet de la peinture. Monet, en effet, a eu beau peindre un tableau de plein air, saisi sur le motif, il est non moins évident que sa toile est le fruit d’une construction dont la naturalité est un leurre.

Dans un ouvrage consacré à l’ impressionnisme, le critique Jean Leymarie écrit : « (…) L’admirable Terrasse près du Havre claquante d’oriflammes, somptueuses de fleurs, inondée de lumière, s’ouvre triomphalement sur le plein air marin et la présence de figures naturelles et bien saisies réalise un accord très heureux de charme intime et de vaste horizon, de vie contemporaine et de lyrisme éternel.» Difficile d’en disconvenir. Il reste que nous ajouterions volontiers que Terrasse à Sainte-Adresse est peut être d’abord une réflexion subtile sur l’art de peindre, c’est-à-dire une démonstration en acte, comme cela se fit si souvent : un art poétique, en somme. Terrasse à Sainte-Adresse est peint à une époque ou les artistes sont familiers de la photographie, voire des estampes japonaises arrivées en France depuis peu. Nul doute que leur vision du monde en ait été profondément affectée. Monet, pour sa part, nous donne, saisis dans le même espace, un encadrement et un cadrage concurremment au travail. Le contraste est en effet remarquable entre le monde parcouru de fluides et de scintillements et cette fraction du tableau à l’immobilité convenue. Construction où chaque plan de la toile constitue pour les autres à la fois un prolongement et une mise à distance. L’art moderne approche à grands pas.

Auteur : Pierre Fresnault-Deruelle

BIOGRAPHIE

Pierre Fresnault-Deruelle est ex-Professeur à Paris 1 (sémiologie de l’image). Il est  désormais membre coopté  du groupe INTRU (Interactions, transferts, ruptures  artistiques et culturels) de l’Université François –Rabelais de Tours.  Il a  fondé le MUCRI en 1999, écrit une vingtaine de livres, dont L’éloquence des images, PUF, 1993,  Intelligence des affiches,  Editions Pyramyd, 2011, Hergéologie, Presses universitaires François-Rabelais,  2013. Il prépare une livre sur Edgar-Pierre jacobs et un autre sur l’iconographie politique.

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