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Pas la vue, la vision : l’entrevision même

par Pierre Fresnault-Deruelle

Pas la vue, la vision : l’entrevision même
  • Titre de l'oeuvre: Papaveri di via Balestrucci
  • Artiste: Lee Hyun
  • Date: 2004
  • Type: Huile sur toile
  • Dimension: 73 x 61 cm
  • Crédit de l'image: ©2004 Lee Hyun

BIOGRAPHIE

Pierre Fresnault-Deruelle est ex-Professeur à Paris 1 (sémiologie de l’image). Il est  désormais membre coopté  du groupe INTRU (Interactions, transferts, ruptures  artistiques et culturels) de l’Université François –Rabelais de Tours.  Il a  fondé le MUCRI en 1999, écrit une vingtaine de livres, dont L’éloquence des images, PUF, 1993,  Intelligence des affiches,  Editions Pyramyd, 2011, Hergéologie, Presses universitaires François-Rabelais,  2013. Il prépare une livre sur Edgar-Pierre jacobs et un autre sur l’iconographie politique.

PAR LE MêME AUTEUR

Un ukiyo-é occidental

Cet inaudible cri qui nous assaille

Préséances

Le cubo-futurisme jazzy de Demuth

L’esprit des salons

L'embrasure fait le spectacle

Un balcon sur la mer

La cécité d’Holopherne

Lamento

Contrepoint

Photographie peinte

Une vaste salle d’attente

Une impassabilité de façade

Le grand absent

Cette jambe qui dépasse

Un éloge en forme d’ "icone"

Le gandin mélancolique

La couleur du temps

La diagonale

L’instant qui conte

La laideur n’est pas inéluctable

Le mur ou la peinture séparée d’avec elle-même

L'immobile intranquillité de Jésus

Bacchanales

La conjoncture, forme supérieure de la conjonction

L'oeil du diadème

Du physique au méta-physique

La Loire

La barque bien menée

La réinvention de Gradiva

Le bout du monde

L’ange, comme en retrait

Le spectacle est aussi dans la salle

D’impassibles machines

Le surréalisme souriant de René Rimbert

La pesanteur et la grâce

Chambre avec vue sur rien

Surprise

Abscisses et ordonnées

Le bout du monde

Le testament d'Orphée

Ligéria ou le lit du fleuve

Soleil noir

Algorithme

Basse tension

Un tableau vivant

2500 ans avant le cinéma

La lune décrochée

La pesanteur et la grâce

Une bien profane icône

Une carte postale avant la lettre

Austère et jubilatoire

Le noeud rose

Entre-deux

Le mille-têtes

Le livre qui tombe

L'étendue du désastre

Pas la vue, la vision : l’entrevision même

par Pierre Fresnault-Deruelle


Il y a d’abord ce rouge orangé, homogène, qui monte au trois-quarts de la hauteur du tableau : monochrome à peine modelé dont, seul le titre nous dit qu’il s’agit d’un champ de pavots, et qu’un Félix Vallotton n’eut peut-être pas désavoué. Ce vermillon nous enchante, surplombé qu’il est par le rideau vert des arbres (des pins, à n’en pas douter). Si ce rouge et ce vert « conviennent ») admirablement, c’est parce que les couleurs complémentaires trouvent, en l’espèce, la caution de la nature ; ce qui signifie que l’artiste se sert du paysage pour faire un tableau, plus qu’il ne compose une toile pour « rendre » ce paysage. A l’instar du peintre « nabi » qu’on vient de citer pour ses voluptueuses plages chromatiques, la sereine Lee Hyun  a d’abord le désir d’écarter généreusement de la peinture. De fait, pour Vallotton comme pour notre coréenne, (re) doubler de la sorte la « peau » du monde n’est qu’un prétexte jouissif ( le tout, précisément, étant d’en susciter l’opportunité). En somme, si Papaveri di via Balestrucci, ressemble (ou a ressemblé) à ce que le peintre a vu à un moment donné de son parcours, il nous importe, surtout, de saisir ce que l’artiste a pu entrevoir, confrontée à son « motif ». Au vrai, la toile nous saisit, non pas parce qu’elle est une vue, mais une vision, cette saisie des choses à laquelle il a fallu donner un lieu propre: le tableau.

Entre le vert et le rouge orangé, il y a ce blanc grisé qui fait office de ciel, alors que la vraisemblance aurait voulu qu’il fût bleu, et cette double bande de violet et de jaune d’or ( la mer, à n’en point douter, et le sable). L’ensemble forme un paysage dont la composition n’est pas sans rappeler ce que peignit, déjà il y a plus d’un siècle, Giovanni Fattori, ce macchiaolo  qui cherchait passionnément à créer des situations plastiques à mi-chemin du sensible et de l’intelligible. Faut-il alors comprendre que cette coréenne de Rome s’est imprégnée à ce point de l’Italie que tel ou tel artiste de la péninsule est capable de se changer, ici, en un devancier inattendu ? Nous le pensons. Si, par ailleurs, bien des tableaux de Lee Hyun laissent deviner que l’artiste oscille entre l’Europe et le Pays du matin calme (Neve, notte in blu ou l’humoristique Sogno II), d’autres toiles comme Indugio nell’ infinito ou Papaveri di via Balestrucci, donnent à penser, au contraire, que, chez cette femme venue de loin, la question des origines, picturalement parlant, s’est estompée. Ou plutôt s’est déplacée. Car, avec ses aplats maçonnés, la toile s’offre à nous comme si l’artiste avait, sans se renier, redécouvert le besoin, éprouvé par les les nabis vers 19OO, de ramener les apparences à un quasi-cloisonnage ( on pense à Charles Filliger). Ironie de l’histoire, on doit rappeler que les nabis admiraient fort la facture épurée des estampes venues d’Extrême-Orient…

Cette toile a, pour nous, quelque chose d’apaisant qui prouverait, si cela était nécessaire, qu’en ce début de XXI°siècle l’art rétinien (pour parler comme Marcel Duchamp) n’est pas mort, tant s’en faut ; que le plaisir n’a pas nécessairement déserté le travail des artistes, et que ce plaisir est toujours contagieux. Partout se lèvent des artistes que le microcosme de la critique – faiseuse de réputations- s’entête à ne pas reconnaître. En Europe, comme à l’étranger, des tableaux ne laissent d’apparaître avec lesquels il faudra bien, un jour, compter. Quoi qu’il en soit, avec cette artiste qui s’acclimate sous nos cieux, et qui exhausse la joie simple, mais non simpliste, d’un métier conquis sur le danger des complaisances décoratives, l’émotion nous envahit

Auteur : Pierre Fresnault-Deruelle

BIOGRAPHIE

Pierre Fresnault-Deruelle est ex-Professeur à Paris 1 (sémiologie de l’image). Il est  désormais membre coopté  du groupe INTRU (Interactions, transferts, ruptures  artistiques et culturels) de l’Université François –Rabelais de Tours.  Il a  fondé le MUCRI en 1999, écrit une vingtaine de livres, dont L’éloquence des images, PUF, 1993,  Intelligence des affiches,  Editions Pyramyd, 2011, Hergéologie, Presses universitaires François-Rabelais,  2013. Il prépare une livre sur Edgar-Pierre jacobs et un autre sur l’iconographie politique.

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