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Le grand absent

par Pierre Fresnault-Deruelle

Le grand absent
  • Titre de l'oeuvre: Portrait d’une dame avec son fils et sa fille
  • Artiste: Jacques-Antoine Lemoine
  • Date: 1787
  • Type: Huile sur toile
  • Dimension: 14,7 x 10,6 cm
  • Localisation: Musée du Louvre - Paris
  • Crédit de l'image: ©Musée du Louvre, M. Beck-Coppola

BIOGRAPHIE

Pierre Fresnault-Deruelle est ex-Professeur à Paris 1 (sémiologie de l’image). Il est  désormais membre coopté  du groupe INTRU (Interactions, transferts, ruptures  artistiques et culturels) de l’Université François –Rabelais de Tours.  Il a  fondé le MUCRI en 1999, écrit une vingtaine de livres, dont L’éloquence des images, PUF, 1993,  Intelligence des affiches,  Editions Pyramyd, 2011, Hergéologie, Presses universitaires François-Rabelais,  2013. Il prépare une livre sur Edgar-Pierre jacobs et un autre sur l’iconographie politique.

PAR LE MêME AUTEUR

Un ukiyo-é occidental

Cet inaudible cri qui nous assaille

Préséances

Le cubo-futurisme jazzy de Demuth

L’esprit des salons

L'embrasure fait le spectacle

Un balcon sur la mer

La cécité d’Holopherne

Lamento

Contrepoint

Photographie peinte

Une vaste salle d’attente

Une impassabilité de façade

Cette jambe qui dépasse

Un éloge en forme d’ "icone"

Le gandin mélancolique

La couleur du temps

La diagonale

L’instant qui conte

Pas la vue, la vision : l’entrevision même

La laideur n’est pas inéluctable

Le mur ou la peinture séparée d’avec elle-même

L'immobile intranquillité de Jésus

Bacchanales

La conjoncture, forme supérieure de la conjonction

L'oeil du diadème

Du physique au méta-physique

La Loire

La barque bien menée

La réinvention de Gradiva

Le bout du monde

L’ange, comme en retrait

Le spectacle est aussi dans la salle

D’impassibles machines

Le surréalisme souriant de René Rimbert

La pesanteur et la grâce

Chambre avec vue sur rien

Surprise

Abscisses et ordonnées

Le bout du monde

Le testament d'Orphée

Ligéria ou le lit du fleuve

Soleil noir

Algorithme

Basse tension

Un tableau vivant

2500 ans avant le cinéma

La lune décrochée

La pesanteur et la grâce

Une bien profane icône

Une carte postale avant la lettre

Austère et jubilatoire

Le noeud rose

Entre-deux

Le mille-têtes

Le livre qui tombe

L'étendue du désastre

Le grand absent

par Pierre Fresnault-Deruelle


Le petit garçon mis à part, les deux femmes regardent celui devant qui elles ont tenu à paraître sous leur meilleur jour. Dans l’encadrement du balcon, les personnages se sont distribués comme si le peintre allait pouvoir instantanément reproduire leur trait et, ce faisant, capter cette discrète scène qui les suspend dans l’affirmation de ce qu’ils sont : le vivant tableau d’une famille unie.

Qui les croque de la sorte ? Le père, ordonnateur de cette petite cérémonie où chacun prend volontiers la pose ? Ne faut-il pas plutôt considérer qu’absent ou mort, ce père a légué sa place à un maître de céans pour lequel cette femme et ses enfants n’éprouvent qu’une attention polie ? Quoi qu’il en soit, la fille a appuyé sa main gauche sur le bras de sa mère, et cette dernière enserre mollement l’épaule du cadet. Le petit mâle, de ce fait, joue vraiment le rôle de soutien de famille.

D’où vient que ce portrait de groupe soit si moderne ? De ceci sans doute qu’avec cette image, nous sommes, quant au format, au sujet et à son traitement, à deux doigts du dispositif photographique. Sans avoir l’air d’y toucher, le garçon tient en effet le cordon qui commande le store -faut-il dire l’obturateur ?- surplombant le trio : un rien suffirait pour que, retombant, le rideau-guillotine ne close la chambre à la fenêtre de laquelle ces gens sont venus s’exposer. Pour l’heure, tandis que la menace dufatum (le retour au noir) plane sur la scène, ces personnages semblent vivre un répit.

Un air de nostalgie marque ces visages graves qu’on dirait épargnés tant ils forment contraste avec leur environnement : outre le store détraqué, la peinture délavée de la boiserie supérieure ainsi que les nombreuses entailles des pierres d’angle disent qu’avec le temps les choses n’ont pas suivi. Sont-ce là les symptômes d’un revers de fortune dont l’absence du père, précisément serait la marque la plus évidente ? L’image d’un deuil -malgré tout apaisé- transpire ici.

Ce portrait de groupe est une miniature. Aussi, l’effet de réel qu’un tableau de taille plus importante n’eût pas manqué de produire (et que ruinera Manet avec Le balcon) est-il en principe hors de mise. La fenêtre, dont on a repoussé derrière soi la croisée, n’est donc pas tant l’artefact par lequel cette famille se serait « ouverte » à nous que le cadre subreptice d’une entreprise de quasi-naturalisation, au sens où il serait ici question de raviver des restes : ceux des jours heureux que la rambarde et le rideau à lamelles de bois maintiennent désormais dans un inatteignable au-delà.

Au vrai, cette peinture avec la mise en scène du manque (l’absence du père), anticiperait sur une plus radicale disparition : celle de cette attendrissante famille elle-même que nous avions, pourtant, pu croire littéralement gagnée à la lumière du jour. Or, ça n’était évidemment qu’un leurre, ou pour être plus exact qu’un déni, puisque nous avions oublié de prendre en compte qu’en l’état, cette miniature ne pouvait être autre chose qu’un médaillon, autrement dit une relique.

Auteur : Pierre Fresnault-Deruelle

BIOGRAPHIE

Pierre Fresnault-Deruelle est ex-Professeur à Paris 1 (sémiologie de l’image). Il est  désormais membre coopté  du groupe INTRU (Interactions, transferts, ruptures  artistiques et culturels) de l’Université François –Rabelais de Tours.  Il a  fondé le MUCRI en 1999, écrit une vingtaine de livres, dont L’éloquence des images, PUF, 1993,  Intelligence des affiches,  Editions Pyramyd, 2011, Hergéologie, Presses universitaires François-Rabelais,  2013. Il prépare une livre sur Edgar-Pierre jacobs et un autre sur l’iconographie politique.

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