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Le bout du monde

par Pierre Fresnault-Deruelle

Le bout du monde
  • Titre de l'oeuvre: Holmen kollen bunker II
  • Artiste: Per Barclay
  • Date: 2005
  • Type: installation avec sang de boeuf et eau – impression numérique marouflée sur aluminium
  • Dimension: 200 x 160 cm
  • Crédit de l'image: par courtoisie ©Galerie Guy Bärtschi, Genève

BIOGRAPHIE

Pierre Fresnault-Deruelle est ex-Professeur à Paris 1 (sémiologie de l’image). Il est  désormais membre coopté  du groupe INTRU (Interactions, transferts, ruptures  artistiques et culturels) de l’Université François –Rabelais de Tours.  Il a  fondé le MUCRI en 1999, écrit une vingtaine de livres, dont L’éloquence des images, PUF, 1993,  Intelligence des affiches,  Editions Pyramyd, 2011, Hergéologie, Presses universitaires François-Rabelais,  2013. Il prépare une livre sur Edgar-Pierre jacobs et un autre sur l’iconographie politique.

PAR LE MêME AUTEUR

Un ukiyo-é occidental

Cet inaudible cri qui nous assaille

Préséances

Le cubo-futurisme jazzy de Demuth

L’esprit des salons

L'embrasure fait le spectacle

Un balcon sur la mer

La cécité d’Holopherne

Lamento

Contrepoint

Photographie peinte

Une vaste salle d’attente

Une impassabilité de façade

Le grand absent

Cette jambe qui dépasse

Un éloge en forme d’ "icone"

Le gandin mélancolique

La couleur du temps

La diagonale

L’instant qui conte

Pas la vue, la vision : l’entrevision même

La laideur n’est pas inéluctable

Le mur ou la peinture séparée d’avec elle-même

L'immobile intranquillité de Jésus

Bacchanales

La conjoncture, forme supérieure de la conjonction

L'oeil du diadème

Du physique au méta-physique

La Loire

La barque bien menée

La réinvention de Gradiva

L’ange, comme en retrait

Le spectacle est aussi dans la salle

D’impassibles machines

Le surréalisme souriant de René Rimbert

La pesanteur et la grâce

Chambre avec vue sur rien

Surprise

Abscisses et ordonnées

Le testament d'Orphée

Ligéria ou le lit du fleuve

Soleil noir

Algorithme

Basse tension

Un tableau vivant

2500 ans avant le cinéma

La lune décrochée

La pesanteur et la grâce

Une bien profane icône

Une carte postale avant la lettre

Austère et jubilatoire

Le noeud rose

Entre-deux

Le mille-têtes

Le livre qui tombe

L'étendue du désastre

Le bout du monde

par Pierre Fresnault-Deruelle


Holmenkollen Bunker II fait partie d’une série intitulée Chambres d’huile. Il s’agit d’un couloir sécurisé puisque, devant la porte du fond (que nous devinons être blindée), se trouve un feu rouge indiquant que la voie n’est pas libre. Doté d’un fort pouvoir réfléchissant, le mélange de sang de bœuf et d’eau répandu sur le sol fait de ce corridor un lieu des plus étranges . Ajoutant au malaise, l’impeccable revêtement qui court jusqu’à la porte à quelque chose de scandaleusement onctueux.

À la différence des œuvres du Land Art dont les performances peuvent être admirées in situ (ne serait-ce qu’un certain temps), l’installation de l’artiste norvégien n’a été élaborée qu’à seule fin d’être reproduite. Comprenons encore que Per Barclay use de la photographie d’une façon très particulière, qu’on qualifiera de « plasticienne » pour la distinguer, non sans quelque arbitraire, de la photographie « d’art » ou « pure ». Au vrai, l’artiste ne traque pas dans le monde ce que (le filtre de) l’image peut en dévoiler, comme chez un Brassaï par exemple ; il considère son cliché comme l’étape finale, mais essentielle, d’un travail mûri au terme duquel le monde est soumis à un double traitement : un réagencement (provisoire) et la reproduction de ce réagencement.

Ayant repéré un lieu propice au cliché escompté – ici un sous-sol, ailleurs une crypte -, l’artiste a nappé le sol d’un liquide fortement réfléchissant  (huile, lait, vin, sang, c’est selon). D’une taille conséquente, ce cliché nous déstabilise. Avec cette mise en abyme du plafond dans le sol, Barclay brouille nos repères de sorte que, du jeu physique – optique -, nous passons à un plan supra sensible. En quel lieu mental nous trouvons-nous donc pour regarder ceci qui prolonge notre champ de vision? Divaguons: le monde que nous parcourons quotidiennement ne serait-il pas la version « positive », mais étriquée, d’un univers complexe que nous efforcerions de maintenir à ses trois dimensions praticables?

En l’état, ce couloir rappelle les géométries cristallines de la Renaissance. Qui plus est, tout se passe comme s’il s’était agi de mettre en concurrence le peu de réalité des choses qui nous entourent avec leurs doubles « excavés». L’artiste italien Pistolletto disait récemment d’une de ses œuvres: «le physique et le non physique se retrouvent à vivre ensemble dans une subtilité de différence infime ». Que ne parlait-il de Barclay !

L’installation photographiée de l’artiste norvégien prend sa place dans la grande tradition des œuvres face auxquelles nous nous éprouvons comme fragiles. Les «vanités», les anamorphoses, mais aussi les toiles de Friedrich, de Munch (Cri) de Magritte (La Reproduction interdite) font de nous des profanes, c’est-à-dire des observateurs à qui on aurait intimé l’ordre de ne pas dépasser le seuil du Temple. Impossible de pénétrer dans ce no man’s land où la moindre irrégularité équivaudrait à une souillure.

L’idée de cette dernière – un moment révoquée en raison de l’aspect immaculé du sol – se fait décidément insistante, confirmant dramatiquement le symbolisme de ce fascinant périmètre. En tout état de cause, Barclay a fait de ce corridor un « bout du monde » ; en l’occurrence un lieu d’avant la séparation du pur et de l’abject. Un lieu sacré.

Auteur : Pierre Fresnault-Deruelle

BIOGRAPHIE

Pierre Fresnault-Deruelle est ex-Professeur à Paris 1 (sémiologie de l’image). Il est  désormais membre coopté  du groupe INTRU (Interactions, transferts, ruptures  artistiques et culturels) de l’Université François –Rabelais de Tours.  Il a  fondé le MUCRI en 1999, écrit une vingtaine de livres, dont L’éloquence des images, PUF, 1993,  Intelligence des affiches,  Editions Pyramyd, 2011, Hergéologie, Presses universitaires François-Rabelais,  2013. Il prépare une livre sur Edgar-Pierre jacobs et un autre sur l’iconographie politique.

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