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L’embrasure fait le spectacle

par Pierre Fresnault-Deruelle

L’embrasure fait le spectacle
  • Titre de l'oeuvre: Gabrielle d'Estrée et une de ses soeurs
  • Artiste: École de Fontainebleau
  • Date: 1594 - 1595
  • Type: Huile sur panneau de chêne
  • Dimension: 95 x 125 cm
  • Localisation: Musée du Louvre - Paris
  • Crédit de l'image: ©Oakenchips - libre de droit

BIOGRAPHIE

Pierre Fresnault-Deruelle est ex-Professeur à Paris 1 (sémiologie de l’image). Il est  désormais membre coopté  du groupe INTRU (Interactions, transferts, ruptures  artistiques et culturels) de l’Université François –Rabelais de Tours.  Il a  fondé le MUCRI en 1999, écrit une vingtaine de livres, dont L’éloquence des images, PUF, 1993,  Intelligence des affiches,  Editions Pyramyd, 2011, Hergéologie, Presses universitaires François-Rabelais,  2013. Il prépare une livre sur Edgar-Pierre jacobs et un autre sur l’iconographie politique.

PAR LE MêME AUTEUR

Un ukiyo-é occidental

Cet inaudible cri qui nous assaille

Préséances

Le cubo-futurisme jazzy de Demuth

L’esprit des salons

Un balcon sur la mer

La cécité d’Holopherne

Lamento

Contrepoint

Photographie peinte

Une vaste salle d’attente

Une impassabilité de façade

Le grand absent

Cette jambe qui dépasse

Un éloge en forme d’ "icone"

Le gandin mélancolique

La couleur du temps

La diagonale

L’instant qui conte

Pas la vue, la vision : l’entrevision même

La laideur n’est pas inéluctable

Le mur ou la peinture séparée d’avec elle-même

L'immobile intranquillité de Jésus

Bacchanales

La conjoncture, forme supérieure de la conjonction

L'oeil du diadème

Du physique au méta-physique

La Loire

La barque bien menée

La réinvention de Gradiva

Le bout du monde

L’ange, comme en retrait

Le spectacle est aussi dans la salle

D’impassibles machines

Le surréalisme souriant de René Rimbert

La pesanteur et la grâce

Chambre avec vue sur rien

Surprise

Abscisses et ordonnées

Le bout du monde

Le testament d'Orphée

Ligéria ou le lit du fleuve

Soleil noir

Algorithme

Basse tension

Un tableau vivant

2500 ans avant le cinéma

La lune décrochée

La pesanteur et la grâce

Une bien profane icône

Une carte postale avant la lettre

Austère et jubilatoire

Le noeud rose

Entre-deux

Le mille-têtes

Le livre qui tombe

L'étendue du désastre

L’embrasure fait le spectacle

par Pierre Fresnault-Deruelle


Dominées par l’ourlet carmin du rideau qui s’est ouvert, Gabrielle et sa soeur apparaissent telles les protagonistes d’une étrange cérémonie. Dans leur baignoire, les deux femmes sont disposées de telle sorte que le téton pincé de l’une se trouve mis en correspondance avec le chaton de la bague de l’autre : jeu maniériste des bras et des mains qui forment un circuit d’échanges d’autant plus sophistiqué que les visages ont la réserve glacée des portraits d’apparat.

Ces figures nues nous troublent en ce qu’elles signifient ouvertement l’érotisme saphique, mais aussi parce qu’il est d’abord question d’une exhibition : sorte d’impudeur effrontée et délicieusement perverse où, paradoxalement, se retrouve l’aura des effigies hiératiques.

L’observateur ne manque pas, évidemment, de se rêver comme tiers en regard des deux sœurs. Assigné à résider en ce lieu imaginaire où le rideau rouge, avant qu’il ne se lève, obturait l’espace scénique, ce spectateur s’éprouve soudain comme un partenaire singulièrement privilégié : ces femmes nues ont voulu ne pas avoir de secret pour lui (fantasme !). Serait-ce la raison pour laquelle le peintre a cru devoir représenter dans le fond, sur le manteau de la cheminée, une oeuvre peinte où sont montrées les jambes ouvertes de quelque idéale créature, c’est-à-dire la partie manquante de ces femmes-tronc ?

Mais le spectateur ne se vit pas que sur le mode du partenariat. Il est aussi voyeur. Gabrielle et sa soeur qui, pourtant, ont « pris les devants » ne peuvent empêcher notre regard d’aller se perdre, précisément, dans les lointains plus intimes de la représentation (cf. le bas du tableau au dessus de la cheminée). Au fond de la pièce, près de l’âtre dont le feu est symboliquement caché par une table recouverte d’un drap (on aperçoit avec peine le haut d’une flamme), se trouve une dame de compagnie dans ses travaux de couture. Elle a beau être habillée, elle ne en nous intéresse que plus. A cet égard, la tenture rouge (à gauche) et la cheminée (à droite) forment un créneau dans l’espace duquel nous atteignons le personnage comme si c’était à son corps défendant. Le feu qui se dissimule dans l’âtre, au contraire de l’anatomie de la figure peinte sur la hotte du foyer, semble vouloir dire que la dame de compagnie (dont les pieds dépassent à peine de la robe) se présente en gardienne d’une privacy d’autant plus désirable que cette couturière est chaste. L’habitacle étroit au deuxième plan, qui donne chichement son assiette à la couseuse matérialise ainsi une zone de parcours jusqu’où le regard prédateur peut se faufiler.

Derrière ce double portrait et son décorum d’emprunt, une scène de genre s’est donc mise en place, avec une narrativité si manifestement lisible que l’espace, lacunaire et fragmenté, laisse à désirer. « L’embrasure fait le spectacle ».

Auteur : Pierre Fresnault-Deruelle

BIOGRAPHIE

Pierre Fresnault-Deruelle est ex-Professeur à Paris 1 (sémiologie de l’image). Il est  désormais membre coopté  du groupe INTRU (Interactions, transferts, ruptures  artistiques et culturels) de l’Université François –Rabelais de Tours.  Il a  fondé le MUCRI en 1999, écrit une vingtaine de livres, dont L’éloquence des images, PUF, 1993,  Intelligence des affiches,  Editions Pyramyd, 2011, Hergéologie, Presses universitaires François-Rabelais,  2013. Il prépare une livre sur Edgar-Pierre jacobs et un autre sur l’iconographie politique.

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